il y avait une espèce de permissivité parce que ces personnes se produisaient dans des lieux précis et la nuit. Mais, à partir du moment où la société comprend qu'elles vivent en dehors de la scène et ne changent pas de costume pour autant et ne demandent qu'à être elles-mêmes (...)

(...) les autorités publiques vont saisir l'urgence qu'il y a à contenir et voire à réprimer l'expression publique et libre du transsexualisme. (...)

(...) la police va intensifier la répression, il y aura aussi au niveau politique la volonté de ne surtout pas s'intéresser à la question pour éviter de légiférer dessus et au niveau psychanalytique, c'est là que les psy commencent un peu à mettre la main dessus (...)

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Le livre de Maxime Foerster est enfin sorti !!

Histoire des transsexuels en France

Préface de Henri Caillavet
Pays d'émergence du phénomène transsexuel au début du XXe siècle, l'Allemagne réunit alors les conditions nécessaires à la mise en pratique des théories du Dr Magnus Hirschfeld sur les "intermédiaires sexuels".

Après le saccage par les nazis de l?Institut de Sexologie, la France prend le relais en Europe : l?artiste Michel-Marie Poulain raconte son changement de sexe dans Voilà et la déportée Marie André Schwidenhammer crée la première structure d?aide aux transsexuels. Ces deux pionnières posent ainsi les jalons d?une visibilité sociale qui atteint son apogée avec la culture cabaret transgenre à Paris dans les années 1950-60 lorsque les Français découvrent la scandaleuse Coccinelle. Cependant, même après la « libération sexuelle », les pouvoirs judiciaires, policiers et psychiatriques mettent en place une répression en vue d?empêcher les transsexuels de changer d?état civil et de faire leur transition dans de bonnes conditions. Les années 80 sont marquées par la figure du Pasteur Doucé qui, avec son Centre du Christ Libérateur, ?uvre à la politisation de la question transsexuelle. Son assassinat en 1990 entraînera la création d?un tissu associatif rassemblant transgenres et transsexuels dans la lutte pour la reconnaissance de leur dignité.

192 pages au format 13 x 20 cm

ISBN : 2-84547-138-6
Photo de couverture : André Nisak



Maxime était déjà venu nous présenter un livre qui s'appelle la différence des sexes à l'épreuve de la république et ce soir il vient nous présenter son futur prochain livre qui a fait l'objet de recherches assez concentrées sur l'histoire des transsexuels.

L'émission s'est ouverte avec une chanson écrite spécifiquement pour Coccinelle qui s'appelle "cherchez la femme".

1ère partie (2639 Ko)
2ème partie (2751 Ko)
3ème partie (2953 Ko)
4ème partie (2988 Ko)
5ème partie (2566 Ko)


 

J'avais envie de commencer l'émission avec cette chanson parce que Coccinelle a symbolisé, et je crois qu'elle symbolise encore pour une certaine génération, le premier visage médiatique du transsexualisme en France.

Ce livre et le fruit de plusieurs facteurs. Intellectuellement parlant j'ai été marqué par le livre de Joan Meyerowitz qui s'appelle "How Sex Changed" qui est l'histoire de transsexuels aux U.S que j'ai découvert lorsque j'étais en caroline du nord et en le lisant je m'étais dit que j'aimerais bien avoir une version française de cette histoire parce que ce qui se passe aux U.S est loin d'être exhaustive et justement je crois que l'histoire des transsexuels est profondément mondiale puisque dans l'histoire que j'ai voulu faire en France je n'ai pas pu faire abstraction ni de l'Allemagne ni des U.S.

Donc, d'un pays à l'autre les histoires se répandent. Il y a beaucoup de passerelles et en lisant cette histoire américaine je m'étais dit que de toutes évidences il manquait des passerelles. Ensuite j'ai lu livre de Vivianne Lamaste qui s'appelle "c'était du spectacle" sur les artistes transsexuels québécois et là ça m'a aussi donné envie parce que plusieurs fois elle fait référence à Coccinelle qui était venue faire une prestation remarquée au québec.

On sent vraiment qu'il y avait une page à écrire et comme en France cette page n'a jusqu'à présent pas encore fait l'objet d'un livre en entier, simplement de quelques paragraphes ici et là, malheureusement parfois écrits par des psy ; c'est dire à quel point j'avais envie quelque part d'ouvrir un chapitre sur cette question ; et puis, il faut dire aussi que j'ai été très marqué par ma rencontre avec Bambi et plus elle m'a fait l'amitié de me raconter sa vie, plus j'ai eu envie d'écrire ce livre parce que quand bien même l'histoire appartient à la famille des sciences humaines, j'ai écrit ce livre en essayant d'associer une rigueur d'historien mais pour moi je l'ai écrit foncièrement comme on écrirait un roman c'est-à-dire vraiment parce qu'elle est romanesque, parce qu'elle est touchante parce que le militantisme n'est jamais séparé de quelque chose de très humain et que dans cette histoire le réel écrase la fiction, le réel est encore plus beau et j'ai donc eu envie de coucher tout ça par écrit et de le partager avec un public le plus large possible. C'est pour cela que le livre a été écrit de façon synthétique pour qu'il puisse susciter l'intérêt non pas seulement de ceux qui sont déjà familiers avec cette question mais de ceux qui n'y connaissent rien et qui aimeraient bien avoir quelques éléments.

J'ai bon espoir qu'il soit publié en octobre aux éditions H&O.

La France est particulièrement hostile aux gender studies en général et aux trans gender studies en particulier. On est dans un contexte où les trans sont plutôt objétisés par les psy donc il n'est pas tellement intéressant de leur donner la parole ou du moins une crédibilité à leur parole. Donc, faire des travaux sur les trans' qui s'affranchissent finalement de l'expertise transphobe des psy ce n'est pas tellement attendu par les milieux universitaires ou éditoriaux. Je dirais que mon livre, parce qu'il est militant n'a été commandé ni attendu par personne et je crois qu'en France effectivement une prise de parole pro-trans' c'est une prise de parole qui s'impose parce que de toute évidence il n'y a pas de place qui est faite contrairement aux U.S, qui est un pays assez schizophrène à bien des égards, mais qui sur la question trans' a déjà réussi à creuser un véritable espace. Je pense notamment au livre de Suzanne streiker qui avait fait une espèce d'encyclopédie de cultures transgenres ; et aux U.S au niveau éditorial et au niveau universitaire on a déjà un public qui est là qui a déjà pris une bonne distance au niveau de la psychanalyse et des psychiatres. Je pense qu'il faut espérer qu'en France, parce que l'on peut pas nier qu'il y a quand même une révolution qui est en train de se faire, avec 15 ans de retard on est en train de publier certains chefs d'œuvre de la pensée queer. On commence petit à petit grâce à Marie-Hélène Bourcier entre autre à donner une crédibilité à l'enseignement des genders studies. On est dans une phase ascendante, de toute évidence avec beaucoup de retard, mais avec énormément d'énergie on va enfin pouvoir prendre la parole. Et, de ce point de vue là, le fait d'avoir trouvé un éditeur, est bon signe.

Cette histoire s'appuie certes sur des archives écrites mais sur des archives orales. Une certaine génération est particulièrement vieille aujourd'hui. Il y a urgence à recueillir leurs témoignages parce que si on ne le fait pas aujourd'hui on n'est pas sûr de pouvoir le faire dans 10 ou 20 ans.

La toute première génération trans' est une génération qui est née dans les années 1920, 1930 et aujourd'hui on a encore beaucoup de témoins qui ont de la mémoire et qui ne demande qu'à partager ce vécu exceptionnel ; encore faut-il qu'il y ait des gens pour les écouter et les enregistrer. Mais c'est aussi ça, il y a eu un petit sentiment d'urgence qui m'a donné envie de ne pas remettre à plus tard l'envie de faire ce livre.

Dans l'introduction j'essaie de délimiter un espace temps pour cadrer le sujet : c'est la France au 20ème siècle et j'essaie d'aborder cela d'un point de vue foucaldien en disant qu'évidemment il y a toujours eu des cas transsexuels, simplement, moi, j'ai voulu le faire dans une conjoncture spécifique qui est la rencontre d'une certaine technique qui est l'hormonothérapie inventée dans les années 1910 à vienne par le professeur steiner en correspondance avec les travaux du professeur hirschfeld sur ce qu'il appelle les intermédiaires sexuels. Pour moi, c'est un petit peu l'oméga. C'est un point de vue foucaldien au sens où le disait foucauld, pour qui l'homosexualité a été créée dans la deuxième moitié du 19ème siècle. Evidemment qu'il y avait des pratiques homosexuelles bien avant et de tout temps, simplement c'était de voir d'un point de vue constructiviste on arrive à un certain moment donné de l'histoire de dire là, il y a foncièrement quelque chose de nouveau, parce que telle technique n'avait pas été inventée avant et telle théorie n'avait jamais été écrite avant. Et moi, c'est sur cette rencontre là c'est-à-dire la théorie des intermédiaires sexuels et les débuts de l'endocrinologie, lorsque steiner arrive à faire des expériences et qu'il écrit des articles en disant "voilà, j'ai transformé tel cobaye de sexe mâle en cobaye de sexe femelle", et vice versa, il va y avoir là quelque chose d'absolument nouveau dans l'histoire de l'humanité. Pour moi c'est le début du livre qui donc, même si c'est une histoire française, commence en Allemagne.

Avec la création de la sexologie au 19ème siècle, on va de plus en plus consigner, même si c'est les psychiatres qui le font, on va consigner les paroles et le vécu des travestis, des hermaphrodites de tout un tas d'individus qui n'ont pas encore créé leur identité mais qui vont le faire ne serait-ce qu'en réaction à celle que l'on va leur coller de la part des institutions médicales. Donc, effectivement, on peut dire que herschfield ne vient pas comme ça ex-nihilo, il s'inscrit directement dans l'héritage de ulrisch qui est le théoricien du 3ème sexe qui définit les uralistes (ceux qui deviendront plus tard les homosexuelLes) comme étant, si ce sont "des hommes : une âme de femme dans un corps d'homme et si ce sont des femmes : l'inverse".

Et c'est assez intéressant de voir, finalement, comment il va y avoir un glissement, cette théorie étant sensée être strictement homosexuelle, il va y avoir à un moment donné ça va servir au contraire à définir et à promouvoir le transsexualisme qui est que justement il y a un sexe anatomique et un sexe psychologique et que l'intérêt c'est d'utilisé les avancées de la science pour faire concorder, coïncider ces deux sexes.

Hierchfeild est un médecin juif homosexuel qui est très investi dans la lutte contre le paragraphe 175 qui est le paragraphe dans le code pénal prusse qui criminalise l'homosexualité masculine et plus précisément la sodomie. Dans son combat, il va se centrer sur ce qu'il appelle les minorités sexuelles. Pour lui ça inclut bien plus que les homo et les transsexuels, car pour lui il y a toute une typologie de ce qu'il appelle les intermédiaires sexuels et il va prendre la défense de tous et de toutes en prenant soin d'une part de les définir sans les pathologiser ; ensuite, il fait un travail de lobbying politique, il a sa carte au SPD qui est le parti socialiste allemand et il va fonder en 1919 l'institut de sexologie à berlin et c'est dans ce fameux institut qu'il va faire travailler des chirurgiens qui vont pratiquer des vaginoplastie, pas les premières, mais qui vont pratiquer dans une optique militante dans un centre prévu à cet effet avec des patient qui sont très bien qui ils sont des vaginoplasties et des mastectomies. De ce point de vue là, on peut dire que herschfield a vraiment contribué au niveau européen à travers ce centre un foyer de réaction à la sexologie pour essayer de faire en sorte que la médecine qui à la base étant hostile aux minorités sexuelles puisse avoir un a priori au contraire qui soit politiquement engagé pour une dépénalisation de tous ces comportements jugés déviants vis-à-vis de l'hétéro-sexisme. Et, de ce point de vue là, il va avoir un rôle fondamental dans l'histoire des transsexuels puisque c'est lui qui va créer la catégorie qui n'est pas de l'homosexualité, qui n'est pas tout à fait travestie qui est déjà l'embryon du transsexuel. Et puis c'est lui qui va donner une certaine publicité à une de ses patientes qui s'appelle lily elbe, une peinte danoise, qui va être bien avant Christine jorgensen la première.

En 1933, les nazis débarquent. Une de leur première priorité c'est de saccager l'institut et de faire un autodafé sur tous les livres et Magnus herschfeld s'enfuie en France. A paris, il rencontre une des pionnières Michelle-Marie poulain qui n'est pas complètement sûre de passer à l'acte et suite à sa rencontre avec le médecin, elle va se laisser convaincre et prendre le partie de faire sa transition. Il y a une espèce de transition qui se fait à double sens entre la France et l'Allemagne. Avec les nazis, tout s'arrête en Allemagne et en France, et herschfeld va à travers Michelle-Marie poulain il va avoir une patiente qui va donner un large battage médiatique au transsexualisme puisque dans un hebdomadaire grand public elle va raconter sur plusieurs numéros (fin des années 30) sa transition sans aucune expertise ni aucun préjugé transphobe de la part des journalistes. Donc, c'est assez impressionnant de voir que les débuts ne sont pas marqués par l'hostilité que l'on va retrouver par la suite.

L'autre transition qui se fait entre Allemagne/France se fait par l'autre pionnière qui est marie-andrée qui sera déportée parce que résistante à titre politique et là, on ne sait pas ce qui se passe mais lorsqu'elle est libérée elle s'assume comme femme et, comme à l'époque elle vient d'une famille bourgeoise qui n'accepte pas sa transition, on songe à la déshériter en utilisant la thèse de la folie, elle est folle puisqu'elle est devenue femme, du coup, sa stratégie de défense est la suivante : "les nazis ont fait sur moi des expérimentations particulièrement folle, ils m'ont forcé à devenir la femme que je suis et donc en quelque sorte, ce n'est pas ma faute si je suis celle que je suis, en tous cas, je continue à prendre mes hormones parce qu'il n'est pas question que je fasse un retour en arrière".

Ces deux femmes vont donc poser en France les jalons du transsexualisme.

Berlin dans les années 20, c'est le berlin des années folles. Tout est possible en Allemagne dans les années 20. Les mouvements anarchistes, pacifistes fourmillent et, entre autre, les mouvements libertaires pour une liberté sexuelle totale. Le berlin des années 20 c'est le berlin de tous ces établissements comme l'eldorado où on pratique ouvertement les bals de travestiEs qui ne sont pas marginaux. C'est vraiment tout le monde qui prend plaisir.

(Carine : en fait, il fait le 1er protocole qui n'est pas médicalisé au sens strict, mais plutôt un protocole sociologique)

Herchfiel est très féministe. Dans son institut, il n'y a pas de discriminations ou d'inégalité de traitement entre les mtf et les ftm. A son époque, déjà, il se démerde pour faire jouer ses relations et faire obtenir des papiers qui vont permettre à défaut d'un changement d'état civil fournir les papiers qu'il faut, qui sont en fait un substitut de changement d'état-civil, pour que ses clients ne soient pas embêtés.

Quand on voit à quel point on est vraiment tombé bas en France avec les ravages de lacan et tous les immondices écrits par les psy à travers leurs protocoles absolument immonde, quand on pense qu'au tout début il y avait un vrai respect, c'est effectivement une surprise de ce livre c'est de voir que les débuts sont prometteurs et respectueux.

(Vincent : vue l'emprise psychiatrique, psychanalytique actuelle, on a du mal à imaginer qu'il y ait eu un "âge d'or" aussi permissif en terme de réassignation sans besoin d'un aval imposé ; alors, la question se pose à partir de quand tout bascule ???)

Il est assez difficile de dire à partir de quand les psy se sont déclarés experts et ont fait un hold-up sur la question trans'. Ce que l'on peut dire, c'est qu'en France, contrairement à l'Allemagne, il n'y a pas eu de bienveillance médicale. On a eu, au mieux de la neutralité sans jugement. Mais la plupart des médecins notamment agnès masson qui a écrit en 1935 un livre qui s'appelle "le travestissement, essai de psychopathologie sexuelle" dit ce qui se passe en Allemagne et préconise de ne pas transposer en France. Cette femme est directrice d'un asile d'aliénés et a donc en quelque sorte un statut de "maîtresse de l'ordre" et elle est experte auprès des tribunaux.

On peut dire qu'en France, d'entrée de jeu, les médecins ont été très réticents à l'implantation de ce qui s'est passé à berlin. Mais il n'y avait pas pour autant de protocole à l'époque. Il y a eu un petit flottement de 20/30 ans comme le disait Bambi qui allait acheter ses hormones comme on va faire son marché. Et au bout d'un moment, de concert avec les autorités juridiques, qui empêchaient les changements d'état-civil, les autorités policières se sont mises à faire de la répression en assimilant travestissement à transsexualisme et prostitution. Il y a donc eu une espèce de concertation qui a fait que les structures de la transphobie se sont organisées et intensifiées en France parce que les pouvoirs publics ont pris conscience que le mouvement était en marche et que par delà la culture cabaret/transgenre limitée à la nuit et à certains lieux, il commençait à y avoir dans l'espace public, finalement, un choix de vie et une visibilité qui nécessitait une réaction au sens réactionnaire du terme.

Magnus Hirschfeld décède à nice en 1935. La culture cabaret qui avait atteint son apogée dans le berlin des années 20 prend son essor en France cette fois-ci. Paris va devenir dans les années 50 et 60 la capitale mondiale de la culture cabaret transgenre. J'ai appelé ça culture cabaret transgenre parce qu'il n'y avait pas que des transsexuelLes qui y travaillaient. En fait, il y avait une espèce de transition entre un spectacle qui était essentiellement basé sur le transvestisme où on singeait d'une façon assez comique les femmes. Avec les transsexuelles, on va basculer sur un registre entre guillemets un peu plus sérieux. Un registre où en fait, il n'y a pas de singerie, pas forcément du burlesque il y a simplement "le spectaculaire : mon dieu c'est une femme". C'est-à-dire, comme le raconte Bambi, que le public est tout simplement soufflé de voir ces artistes faire tout simplement leur performance. Et quand je dis le public, c'est pour cela que l'on peut dire que paris et vraiment la capitale mondiale, c'est que dans le public il y a vraiment d'une part une bourgeoisie parisienne mais surtout tout le gotha mondial.

Tout gravite essentiellement autour de deux cabarets : Mme Arthur et le Carrousel. Si le public est mondial, les artistes le sont aussi. C'est ainsi qu'il va y avoir des artistes anglaises comme April ashley qui sera assez connue par la suite parce qu'elle va épouser un anglais qui se termine par un procès pour divorce mais finalement, le divorce n'aura pas lieu car le mariage est liquidé en disant qu'il n'y avait pas eu vraiment mariage. Elle va donner une certaine notoriété au transsexualisme de part sa jurisprudence.

La France exporte via le carrousel toute une conception du cabaret transgenre dans le monde entier. C'est aussi à cette époque là que ce fait une espèce de correspondance entre paris et casablanca puisque en France on n'opère pas, tout du moins, d'une façon légale. Du coup si monsieur marcel (propriétaire du caroussel), pied noir algérien joue un rôle fondamental, un autre pied noir, georges Burou fonde la clinique du parc à casablanca où il va pratiquer les vaginoplastie en ayant inventé une technique dont se vantera Coccinelle en disant que christine jolgersen a un vagin en plastique mais moi j'ai un vagin naturel car le docteur Burou grâce à sa technique d'inversion de la peau du pénis m'a donné un vagin naturel.

Georges Burou aura une clientèle pendant une vingtaine d'année jusqu'à ce qu'à ce qu'ensuite, à londres notamment on puisse trouver d'autres chirurgiens de très haute volée.

En France, une loi interdisait tout ce qui relève de la castration ou de la mutilation et selon l'interprétation qu'à l'époque on a fait de la loi, on disait que la chirurgien de redétermination sexuelle relevait de la castration ou de la mutilation. Et, de ce point de vue là, c'était jugé complètement illégal.

Il y avait tout de même une différence de parcours entre les trans', il y avait les stars et les autres galéraient ; autant les flics ne cognaient pas trop sur les stars et avaient un peu ordre de les respecter autant les autres étaient harcelées, acculées à gagner leur vie d'une façon qu'elles n'avaient pas forcément choisie car pour travailler dans ce milieu là, pour percer sur scène il fallait se payer des tenues qui n'étaient pas payer par le patron.

Contrairement à jogersen, Coccinelle n'a jamais joué la carte "honteuse". Elle s'inscrivait de bon cœur dans une sociabilité transsexuelle. Autant jogersen est dans une optique de respectabilité et de solitude, autant avec Coccinelle et plus largement avec la culture cabaret transgenre, on pose les jalons d'un groupe.

Lorsque le Caroussel doit fermer ses portes près de l'élysée, il rouvre rue vavin et là, c'est assez fascinant parce que le patron va investir dans un cabaret qui s'appelait "Elle et lui", un cabaret lesbien juste à côté de la réouverture du caroussel avec des loges communicantes. Et il y aura beaucoup de communication avec ce que l'on appelait les "garçonnes" et les divas du carrousel. Parmi les spectacles qui ont lieu chez "Elle et lui", on a des spectacles de travestis où les femmes habillées notamment en cow-boys ou en chapeau melon font des performances qui font, on pourrait pas parler de drag kings parce que ce serait anachronique aussi, mais c'est tout à fait ça. Les garçonnes ont une place qui est peu être mineure mais qui est loin d'être marginale dans cette culture cabaret.

J'en profite aussi parce que j'ai passé sous silence que certes, il y a les divas du cabaret mais il y a eu aussi et là, je suis assez frustré parce qu'il n'y a pas beaucoup d'archives, et je crois que ce serait un travail à part entière, mais il faut aussi se renseigner sur ces athlètes françaises qui ont changé de sexe. Il y a eu violette maurice, j'en parle dans le livre, qui s'était fait faire une mastectomie en 1929 et qui a immédiatement médiatisé parce qu'on lui a refusé sa licence de sportive ensuite en disant que ce soit un scandale qu'elle soit homosexuelle et qu'elle se travestisse. Officiellement, sa mastectomie, c'est que ça la dérangeait pour conduire. Le biographe qui a fait la biographie de Violette Maurice ne semblait pas très familier avec la problématique de l'identité de genre et n'a pas trop cherché à comprendre si Violette était femme ou homme. Mais enfin, il y avait déjà une histoire à écrire.

Puis deux autres athlètes françaises vont changer de sexe. Il y a tout un travail de recherche à faire. C'était beaucoup moins médiatisé que l'inverse mais ça se passait déjà dans les années 20 et 30 pour Violette Maurice et 40/50 pour les autres athlètes.

Pour en revenir au cabaret, il y avait une espèce de permissivité parce que ces personnes se produisaient dans des lieux précis et la nuit. Mais, à partir du moment où la société comprend qu'elles vivent en dehors de la scène et ne changent pas de costume pour autant et ne demandent qu'à être elles-mêmes et qu'on les voit, entre autre, sur les trottoirs, puisqu'il y a aussi, il ne faut pas le nier, une bonne partie de prostitution, les autorités publiques vont saisir l'urgence qu'il y a à contenir et voire à réprimer l'expression publique et libre du transsexualisme. Les autorités ont l'impression qu'il y a quelque chose qui leur échappe. La réaction est que suite au changement d'état-civil de Coccinelle, il va y avoir une espèce de moratoire de plusieurs années on va plus les accepter du tout et puis, la police va intensifier la répression, il y aura aussi au niveau politique la volonté de ne surtout pas s'intéresser à la question pour éviter de légiférer dessus et au niveau psychanalytique, c'est là que les psy commencent un peu à mettre la main dessus.

J'ai cité des phrases de lacan qui dit "ne les écoutons pas, ne les prenons pas au sérieux, ils sont dans leur délire ; on n'est pas là pour les accompagner dans leur transition mais pour entraver cette folie qui est une atteinte à l'ordre symbolique".

Lorsque je dis que c'est romanesque, que ce n'est pas simplement les divas des années 50/60, il y a tellement de trajectoires extraordinaires que ce soit Michelle Marie Poulain, Marie Andrée, le pasteur doucé, chacun est vraiment un personnage de roman.

 

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